Ubérisation du P.I.B
L’ubérisation du PIB... doux rêve de certains chefs économistes ou simple utopie des temps modernes ? Il n’y a pas de réponse toute faite mais derrière cette idée se trame une réflexion plus profonde, la limite de certaines théories économiques existantes.
Voici ce qui m’interpelle et que j’oserais partager avec vous :
Avant de commencer, sachez que les propos ci-dessous - qui sont personnels et dénués d’une quelconque réappropriation des considérations de certains économistes émérites - n’ont pas vocation à énoncer une vérité. Ces propos visent simplement à partager une façon différente de voir le monde parce que la transformation commence par accepter de voir les choses différemment...
Aveu de faiblesse ou tout simplement, limite de la condition humaine... Force est de constater que les modèles mathématiques (tant usités par nos économistes en herbe, dignes héritiers des David Ricardo, John Maynard Keynes, Adam Smith, Joseph Schumpeter...) ont leurs propres limites. Eh oui ! ce concept d’ubérisation du PIB nous livre ici, en lisant entre les lignes, une interrogation contextuelle mais légitime sur la théorie quantitative de la monnaie dite « théorie monétariste » (exprimée sous forme d’équation), élaborée en son temps par Irving Fischer et ses pairs, puis enrichie par feu Milton Friedman.
Quelle équation ! Fusse-t-elle aussi riche et belle, nourrissant jusqu’à présent nos velléités de croissance économique pour nos chers pays industrialisés.
Équation, vous avez dit, équation mais plaît-il, qu’en est-il ? Chut ! Je vous la livre immédiatement : M * V = P * T (lien wikipédia pour explorer cet univers : https://fr.wikipedia.org/wiki/Irving_Fisher)
4 variables, ô combien précieuses, pour comprendre une partie de l’histoire des politiques économiques passées.
· M = Masse de monnaie en circulation
· V = Vitesse de circulation de la monnaie
· P = Niveau des prix des biens et services
· T = Volume des transactions
Désormais, les variables de l’équation sont à reconsidérer avec l’émergence du digital, notamment le « V », le « P » et le « T », questionnant fortement le modèle car toutes ces variables sont étroitement liées. Le digital est en train de redistribuer les cartes de cette équation, notamment parce qu’il nous fait toucher du doigt une nouvelle condition, non énoncée jusqu’à présent, l’accélération de la vitesse d’obsolescence des biens et services... à une vitesse exponentielle. Ce nouveau paramètre complexifie de fait la capacité à apprécier le niveau réel des prix et son évolution (à données constantes pour avoir des bases comparables).
Autrement dit, le digital bouscule les règles du jeu de notre modèle économique existant. Le digital rappelle doucement à nos hommes politiques que la politique monétaire, un des instruments mis à leur disposition pour définir leur politique économique, est mise à mal.
Explorons un peu plus loin les contrées dessinées par ce concept d’ubérisation du PIB. Le digital est la troisième révolution économique, révolution dite « des services ou secteur tertiaire », comme fut en son temps - seconde moitié du XIXème siècle - la révolution industrielle permettant de passer d’une société agraire à une société commerciale et industrielle.
Le digital bouscule les règles du jeu de notre modèle économique existant
Comme toute révolution, elle s’accompagne de l’essor/émergence d’un nouveau modèle économique (à définir car nous cherchons encore les pistes...) dont le digital est le porte-drapeau.
Pour autant, le digital a des effets corollaires sur bien des domaines de la sphère privée, qui vont nécessiter de remodéliser les comportements de l’homo economicus (descendant de l’homo sapiens ; être cher à Rousseau dans son « Discours sur les sciences et les arts », 1750). Les anthropologues, sociologues, etc. ont déjà observé certains phénomènes et pour tout dire, Alain De Vulpian a commencé à poser les premiers éléments de réflexion sur ces phénomènes dans son essai « Eloge de la métamorphose, en marche vers une nouvelle humanité », Editions Saint-Simon, Prix de l’Académie Française 2016 !
http://www.solfrance.org/eloge-de-la-metamorphose/
Ma conviction personnelle, c’est qu’il est temps de « dé-siloter » et de regarder le modèle dans sa globalité. Les nouveaux modèles économétriques, qui permettront de déterminer les variables inhérentes au moteur de la croissance, doivent être élaborés en concertation entre économistes, anthropologues, sociologues... car ils détiennent tous une partie de la réponse au modèle. Un modèle qui n’a de sens qu’en assemblant toutes les pièces...
Il est temps de « dé-siloter » et de regarder le modèle dans sa globalité
Si l’on change le paradigme, alors on pourra basculer d’une vision rétrospective projetée à une vision prospective (s’appuyant sur les comportements et phénomènes observables présents pour les projeter dans le futur). Au centre de nos considérations, le comportemental - donc l’humain en tant que plus petit élément unitaire et ses besoins d’appartenance, constitutifs des groupes, sociétés, nations - qui est la clé de l’énigme pour définir le modèle économique de demain...
Le comportemental : la clé de l’énigme pour définir le modèle économique de demain...
La transformation de la société démarre par l’acceptation de l’homme - individu - à se transformer lui-même. Il n’est pas inutile de le rappeler car on l’oublie trop souvent, par confort ou peur, angoisse mais encore faut-il savoir vers quoi nous allons... et avoir l’audace d’explorer un nouveau monde où bien des contours sont à redéfinir.